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Recyclage éclectique
2 mai 2007

Vivre

On pense toujours à l'esquiver. On veut en finir. Quand on s'accroche, qu'on se fait mal. Quand l'une des parties de notre corps nous fait souffrir,

on veut l'enlever: la douleur. La retirer, sans rester, une seule seconde, dans une position un tant soit peu inconfortable.

Il vente très fort. L'eau me semble un immense miroir dont la glace se moule dans les déboires de l'aire. Le souffle sur nous force le mouvement de la track aqueuse de notre canot. Lui, Il suit les rails, ou le métronome de nos coups d'aviron, de nos mouvements de bras. Mes épaules roulent comme si elles tournaient sur une vis. Mes jambes forment un angle droit, dans mes genoux. Et le creux de mes pieds, nus, enrobent la barre de portage, pour éponger l'effort. Je les pousse, presque, dans le bois, rugueux. Je sens une écharde dans mon pouce.

Je continue de faire aller, toujours calés dans le même mouvement régulier, mes bras: moteur. Et j'ai mal. Mon bras gauche est complètement engourdi, ma main droite est figée, enroulée sur la rame. Qui fait avancer mon canot, qui pointe vers rien du tout, sinon des arbres, au loin, et qui revient de rien de tout, sinon, de l'eau. Limpide et forte. Et lourde, dans les muscles de mes bras.

Dans les moments où notre réflexion est étouffée automatiquement par l'envie d'en finir, et de revenir à l'état, soudainement jouissif, où l'on était banalement, au neutre, sans douleur. On y porte jamais vraiment attention, mais on passe notre temps dans le confort. On est constamment ouaté. On s'accroche le petit orteil; on crie.

Avoir mal, un instant. Chasser, en y mettant une seconde de réflexion, l'idée d'arriver rapidement, et systématiquement au de-là du moment désagréable. Puis, considérer, nue, la douleur. Les pleurs qui viennent, notre peau qui est meurtrie et qui brûle, notre coeur qui s'émiette, nos tempes qui jouent du tambours...Rester quelques secondes dans l'instant fugitif: présent. Être presque en symbiose avec la seconde qui meurt dans une aiguille quelque part.

Et quand on revient de cette douleur, on vit, délicieusement, notre confort. La douceur du moment tapisse notre corps.

Au lieu de toujours envisager, penser à la suite, à toujours imaginer l'avenir, toujours rêver à demain...alors qu'aujourd'hui brûle dans nos mains.

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Commentaires
R
Vivre hébété par la lenteur du jour, est-ce vraiment souhaitable, tout le temps? Ne jamais penser à l'avenir, ne jamais angoisser parce que notre corps se sent bien, est-ce vraiment une solution?<br /> <br /> Ton message est vraiment très beau, et il me fait penser que je devrais plus souvent manger des cannes de pêches tranchées, l'été, quand il fait soleil et que je jouis de chaque bouchée, mais l'angoisse est au coeur de l'existence.<br /> <br /> Sans angoisse, c'est la satisfaction. Et ça, j'ai dit non merci depuis longtemps, peu importe ce que ça me coûte en langueur et en mal-être...<br /> <br /> PS: Merci de me rappeler les plaisirs de la vie dans ton blog. Tu les décris si jouissivement.
A
wow charlotte! jai compris!! cest tellement beau, oui cest toujours comme sa apres que quelque chose de mauvais nous arrive on aprecie quand sa redevient beau..mais qu'est ce qui est triste cest que sa dure un ptit bout mais ensuite on oublie et on recommence a "taking everything for granted", il faut qu on vive heureux avec ce qu on est chanceux davoir, jespere quon le realisera avant quil soit trop tard :)
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