couleur nocturne
La nuit, je fais de l'insomnie, moi. Comme, sûrement, plein de gens. Et parce qu'à l'école on a fait de la poésie durant toute une nuit, blanche, blanche, blanche, je trouvais que c'était de circonstances.
En réalité, c'est de moi qu'augure la circonstance, peut être que vous ne la sentez pas, il faut la comprendre, et l'entendre. Elle ne vous parlera pas au début, mais au moins vous goûterez la mienne.
Elle est un drap qui nous recouvre.
Elle est une lanterne qui me tient éveillée.
Elle est latente dans les heures.
Elle est la clé dont la serrure couvre
toutes nos folies. Elle vient massacrer
la clarté dont jouissait les horreurs.
Sa noirceur froisse d’une main ce qui nous effrayait :
nos déchets humains, à froid dans le jour,
cruellement exposés, à nos yeux, sensibles.
Elle se déploie sur nous, elle tait,
notre toux : les hurlements trop lourds
de la douleur dont nous sommes tous passibles.
Elle déborde dans mes mains.
Elle coule sur mes yeux, en ouvrant mes paupières,
dépoussière mes idées, et casse ma fatigue.
Elle craint le matin
et repousse mes œillères.
Et ma tête qu’elle irrigue,
ouvre ses voiles.
C’est si rare qu’on sent le vent
transpercer son regard,
assourdir dans nos creux, nos plis, le mal.
Et peu importe vraiment le moment,
Où ses cheveux m’ abordent, épars,
la nuit est toujours là, fidèle et belle.